Evangile de Jésus-Christ selon Saint Matthieu
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Vous avez appris qu’il a été dit : Œil pour œil, et dent pour dent.
Eh bien ! moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant ; mais si quelqu’un te gifle sur la joue droite,
tends-lui encore l’autre. Et si quelqu’un veut te poursuivre en justice et prendre ta tunique,
laisse-lui encore ton manteau. Et si quelqu’un te réquisitionne pour faire mille pas, fais-en deux mille avec lui.
À qui te demande, donne ; à qui veut t’emprunter, ne tourne pas le dos !
Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi.
Eh bien ! moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent,
afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux ;
car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. En effet, si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous ?
Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ?
Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ?
Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ?
Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »
Le contexte
Nous lisons ce dimanche un extrait du sermon sur la montagne qui est un peu le discours-programme de Jésus au début de l’Evangile de Matthieu. Jésus aborde ici un sujet ô combien d’actualité,
celui de la réaction à avoir en cas de conflit.
Vous avez appris… Moi, je vous dis…
Jésus semble se situer en contradiction avec les paroles de l’Ancien Testament.
Il risque une parole personnelle qui témoigne de sa pleine liberté.
En fait, il ne se place pas en opposition avec sa foi juive et la Loi qu’il pratique
mais ses paroles sur l’amour des ennemis visent au plein accomplissement de la Loi.
Tu veux vraiment accomplir la Loi juive, tu veux véritablement respecter ce que Dieu te demande, alors n’en reste pas à une observance scrupuleuse qui est un cadre nécessaire mais fais un pas de plus :
Aime ton ennemi. Ce pas de plus, est celui que Jésus a fait durant sa vie.
Aimer son ennemi, pourquoi cela vient-il si tard ?
Dieu est un bon pédagogue. De la même manière qu’une maman ne va pas donner à son enfant une nourriture solide dès la naissance de son petit, Dieu nous propose un enseignement progressif. D’abord, la loi du talion (voir mot du jour) puis la loi de l’amour total. Il aurait été inimaginable que Dieu exige cela de l’être humain dès le début, la société n’aurait pas été prête à accueillir cela. Dieu s’est adapté à la culture dans laquelle il s’est rendu présent pour progressivement nous amener plus loin.
Tendre la joue, aimer son ennemi, serait-ce possible ?
Jésus de façon provocatrice nous invite à casser la logique du mal.
Je te fais mal, tu me fais mal, on se fait la guerre…
A un moment, il faut bien qu’un processus de paix voit le jour, c’est cela tendre l’autre joue.
Et en pratique, cela marche; Regardez Gandhi en Inde ou Martin Luther King aux Etats-Unis.
Tu m’as fait (du) mal mais je ne veux pas que cela continue. Alors, j’accepte de ne pas te le rendre pour que cette situation cesse. Même si, par conséquent, je dois vivre une forme d’humiliation.
Que ce soit dans nos familles, entre des pays, la paix est à ce prix.
Les paroles de Jésus t’agaceraient elles ?
Bien évidemment, ce type de paroles peuvent nous agacer. D’abord, parce qu’on se sent si loin de cet idéal évangélique et en même temps, on sait bien que si tout le monde agissait de la sorte, nous vivrions dans la paix et l’amour. Nous savons ce qu’il faut faire mais nous ne le faisons pas parce que nous attendons que l’autre fasse le premier pas. En fait, c’est cela qui est agaçant. Jésus appuie là où cela fait mal.
Incapables de pardonner, nous nous faisons du mal. Dommage !
Attention !
La crise des crimes, délits et abus dans l’Eglise nécessite que nous comprenions bien les paroles de Jésus.
La justice doit être appliquée et tendre l’autre joue ne consiste pas à taire les actes ou attitudes que l’un ou l’autre a pu me faire subir. Il ne peut y avoir de véritable paix sans justice.
Jésus demande dans ce discours de casser la spirale mortifère du mal, de la violence.
Pour cela, porter plainte est une attitude profondément évangélique qui rend possible la fin de cette violence.
Pour actualiser
Vivre l’Evangile c’est aller à contre-courant. Aimer son ennemi, prier pour lui non pas parce que c’est mon ennemi mais parce que Jésus a versé son sang pour tous, pour moi, pour lui, c’est suivre notre divin maitre. Cela ne peut se vivre que dans la prière. C’est difficile mais possible, il suffit d’essayer.
Le mot de la semaine : Talion
La loi du talion, consiste en la réciprocité du crime et de la peine. Cette loi (« Œil pour œil, dent pour dent ») caractérise un état intermédiaire de la justice pénale entre le système de la vendetta et le recours à un juge impartial et désintéressé.